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Passion et Mans

Porsche 911 (964) Turbo S LM

Porsche 911 Turbo S LM Hans Stuck 24 Heures du Mans 1993.
Hans Stuck en pleine attaque à la sortie de la chicane Ford lors des 24 Heures du Mans 1993.

Au lendemain des 24 Heures du Mans 1992, marqués par un plateau de qualité mais ne proposant que 28 voitures au départ pour un circuit pouvant, à l'époque, en accueillir 50, l'Automobile Club de l'Ouest décide, unilatéralement, de quitter le Championnat du Monde des Voitures de Sport.
Ce changement permet à l'ACO de reprendre en mains l'intégralité de l'organisation de sa course, mais aussi de pouvoir édicter son propre règlement pour l'édition 1993.
Ce choix, qui a pu paraitre abrupte sur le moment, fût pourtant salutaire pour l'épreuve mancelle car elle permit à l'ACO de prendre des contacts avec différents constructeurs et concurrents, et d'élaborer en partenariat avec eux la future réglementation, alors que fin 1992, la FISA tuait littéralement le Championnat du Monde.
Globalement, le règlement ACO reprenait celui de 1992 concernant les Sport Prototype 3,5l, les Groupe C, mais avec des contraintes différentes, il validait la participation des barquettes nationales type Spider 905 ou Coupe Alfa Romeo, mais il permettait surtout aux Grands Tourismes de faire leur retour dans la Sarthe après six ans d’absence et la participation de la Porsche 961 en GTX en 1987.

Le retour discret de Porsche.

 Porsche, dont le lien avec les 24 Heures ne s'est jamais démenti,  est évidement partie prenante dans l'élaboration du règlement ACO 1993, et la marque de Stuttgart, bien qu'en délicatesse financière, entrevoit alors un moyen de faire un retour discret en Endurance.
Le service course va alors développer deux autos fabuleuses.
La première, la Carrera RSR 3,8l, destinée à la compétition client, restera à jamais dans le cœur des porschistes comme la version la plus ultime des 911 atmosphériques, malgré la 911 R de 2016.
La seconde, exemplaire unique représentant l'Usine de la façon la plus indirecte possible pour ne pas donner du grain à moudre aux financiers,  est extrapolée en partie, pour des raisons d’homologation, de la version la plus radicale de la 964 sortie en 1992, la 911 Turbo S "Leichtbau" (construction légère en allemand) produite à 86 exemplaires.
L'idée étant évidement de battre Jaguar, qui a annoncé son retour dans la catégorie avec des XJ220 développées et préparées chez Tom Walkinshaw.

911 Turbo S LM Pesage des 24 Heures du Mans 1993.
La 911 Turbo S LM fit grande impression lors du pesage des 24 Heures du Mans 1993.

Alors qu'une partie des employés de Zuffenhausen travaille sous la direction de Jürgen Barth à l'élaboration de la RSR 3,8l, l'autre partie, dirigée par Norbert Singer, part de zéro, ou presque, pour construire la version turbo. 
Les ingénieurs allemands partent, semble-t-il, car celle-ci n'est apparemment pas frappée, d'une coque aux spécifications Leichtbau et continuent le travail d'allègement, tout en élargissant les voies et en l'adaptant à des roues de 18" limitées réglementairement à 12" de largeur.
Certains éléments de carrosserie de la Leichtbau, en composite carbone/fibre de verre, comme les portes, les ailes avants, sont réutilisés tels quels, les ailes arrières, le capot avant, les boucliers et surtout l'énorme aileron arrière bi-plan, sont développés spécifiquement pour l'auto.
Pour gagner encore du poids, les garnitures de porte et d'autres éléments sont remplacés par de fines feuilles d'aluminium.
Comme sur la RSR 3,8l, l'arceau cage est ajusté au plus près de la coque et soudé à celle-ci en de nombreux points pour améliorer la rigidité.
Hormis le pare-brise, l'intégralité du vitrage, déjà allégé sur la Leichtbau est remplacé par du plastique.
Le résultat de cette cure d'amaigrissement est impressionnant, avec 1054 kg, la Turbo S LM sera le plus légère des GT lors du Pesage des 24 Heures du Mans 1993, bien en dessous des 1125 kg des Jaguar XJ220 C TWR, ses concurrentes directes.
D'un point de vue esthétique, la S LM rappelle d'une façon évidente la première 935, celle de 1976, ce qui n'est pas pour déplaire aux amateurs.
Concernant la motorisation, chez Porsche, on ne va pas faire les choses à moitié.
En effet, les ingénieur de Zuffenhausen ont bien étudié le règlement et y ont détecté une faille.
En effet, pour les GT, les brides à l'admission étant censées limiter la puissance moteur ne dépendent pas de la cylindrée ni du fait que le moteur soit suralimenté ou pas, mais du nombre de soupapes par cylindre.
Le rusé Norbert Singer va s’engouffrer dans la brèche et remplacer le 3,3l de la Leichtbau par le 3160 cc qui motorise habituellement la 962.
Ainsi, la S LM bénéficie de brides de 34 mm puisque le 3,2l est équipé de culasses à deux soupapes par cylindre, alors que les Jaguar, motorisées par un V6 à quatre soupapes par cylindre, on des brides de 34 mm.
De fait, la courbe de puissance est bien plus avantageuse sur la Porsche et les chevaux arrivent beaucoup plus tôt.
Traditionnellement à refroidissement mixte, le bloc 962 est installé cette fois en version refroidissement à air, un radiateur d'huile, situé dans l'aile avant droite, l'aidant à dissiper les calories.
Le 3,2l bénéficie du double allumage dont la gestion, ainsi que celle de l'injection et de la pression des deux turbos KKK est confiée à un système Bosch Motronic 1.7 spécifiquement développé pour la S LM.
Le 962 bi-turbo a également été équipé d'arbre à cames spécifiques, et, dans cette configuration, il développe un peu moins de 500cv, mais dès 7500 tr/min.
La voiture est achevée dès la fin de l'hiver 1993 et après plusieurs séances de roulages et un test d'endurance, elle est inscrite aux 12 Heures de Sebring fin mars.

Porsche 911 Turbo S LM Stands 24 Heures du Mans 1993.
La Turbo S LM est choyée dans les stands des 24 Heures du Mans 1993 par des hommes en salopettes rouges d'une équipe Porsche qui se refuse à dire son nom.
Des débuts prometteurs.

Dans la droite ligne de la politique commerciale de Porsche, partagée entre l'ancien et le nouveau continent, la Turbo S LM va faire ses grands débuts en course en Floride, le 20 mars, lors des 12 Heures de Sebring.
Pour l'occasion, et pour éviter toute suspicion de la part des financiers de la marque de Stuttgart, l'auto est engagée en INV GT, une catégorie censée être plus proche de la série que les GTU américaines, et sous les couleurs bleu, blanc et rouge du team Brumos.
Côté pilotes, Hans stuck et Walter Röhrl, qui ont développé la S LM sont présents et, pour des raisons évidentes déjà citées plus haut, l'américain Hurley Haywood, vainqueur au Mans en 1977 et 1983 complète l'équipage.
Dès les essais, Hans Stuck va placer la barre très haut sur ce circuit très cassant.
Il signe le 17ème temps en 2'08"205, 1ère en INV GT et surtout seulement devancée par les deux Nissan 300 ZX du Cunningham Racing et l'Oldsmobile Cutlass du Rocketsports qui en 1'57"620 se montre la plus rapide de ce qui peut s'apparenter à une GT.
La course va être dominée par les Eagle Toyota Mk III et marquée par un violent orage pour respecter la tradition.
La Turbo S LM termine septième et victorieuse de sa classe, à seulement 16 tours de l'Eagle victorieuse, après une course où elle s'est montrée étonnement fiable.
Deux mois plus tard , le 16 mai, la 911 Turbo S LM, dans un blanc immaculé, est présente pour les Essais Préliminaires des 24 Heures du Mans 1993.
Pour l'occasion, Hans Stuck et le manceau Lionel Robert, habituel résident de chez Courage la pilote.
C'est Hans Stuck qui va signer les deux temps les plus significatifs.
Juste avant la pause, le bavarois  tourne en 4'07"740 et fini l'après midi en 4'04"67 dans le sillage de six Groupe C ancienne génération, deux Courage et quatre Porsche 962.
Non seulement la Turbo S LM est à moins de neuf secondes de la Courage la moins rapide, mais elle colle 12 secondes à la XJ220 C la plus véloce pilotée par Jay Cochran.

Une course tronquée.
Porsche 911 Turbo S LM Hurley Haywood 24 Heures du Mans 1993.
Hurley Haywood vient de prendre son relais et continu à remonter vers la tête de course lors des 24 Heures du Mans 1993.

Après un passage sans difficulté au pesage, malgré un évident mécontentement de Tom Walkinshaw qui promet avoir trouver une solution pour rendre les XJ220 C  plus rapides, la Turbo S LM, engagée cette fois au nom du "Le Mans Porsche Team", attaque les essais.
Dès le mercredi soir Hans Stuck va frapper fort en signant un 4'06"510", 1"84 moins rapide qu'en mai, mais la voiture est dans une  configuration plus sage , et il inscrit directement le meilleur temps des GT.
Les XJ220 C TWR ont beaucoup progressé puisque, le jeudi soir, David Brabham va se placer à 1"37 de la Porsche qui affine déjà les réglages course.
Stuck, sans forcer et sans avoir besoin de se défendre le jeudi, signe le 21ème temps au départ, plus rapide du groupe 4 et à peine une seconde derrière la moins rapide des Groupe C d'ancienne génération engagée en C2.
Dans la seconde courbe à droite entre Mulsanne et Indianapolis, désormais l'endroit le plus rapide du circuit depuis la construction des chicanes, la S LM va être chronométrée à 315 Km/h, un à deux km/h plus vite que les XJ220 C en vitesse de pointe.
C'est Hans-Joachim Stuck qui va prendre le départ et quel départ!
Le bavarois sort l'attaque des grands jours, plaçant la 911 Turbo S LM parmi le protos du Groupe C2.
Précédant la moins rapide des Courage, il menace directement les deux autres ainsi que la plus rapide des Kremer C-K6.
Il pointe au quinzième rang à la fin de la première heure et déjà mis un tour à toutes les autres Porsche GT, seule la meilleur des Jaguar, celle de Brabham, Coulthard et Nielsen, réussi à se maintenir à 36 secondes.
Mais quatre minutes plus tard, Stuck anticipe son relais et rentre, accélérateur bloqué.
Malgré l’efficacité des mécanos de l'usine, la réparation va durer 21 minutes.
Lorsque Walter Röhrl retourne en piste à 17h25, la S LM est tombée au delà de 40ème place à cinq tour de la Jaguar n°50 qui a pris le relais en tête des GT.
John Nielsen, rentré en même que la Porsche, a pourtant connu une belle émotion en redémarrant des stands.
De l'essence s'est échappée lors du ravitaillement et la XJ220 C repart en flamme. L'incendie est heureusement vite maîtrisé par les commissaires et le danois retourne en piste pour doubler son relais.
Röhrl donne tout ce qu'il peut et remonte quarantième à 18 heure, il rentre à 18h39 pour passer le volant à Haywood.
A 19 heure, l'américain a regagné sept place et revient comme une balle sur la Venturi Agusta.
Haywood fait une relais exceptionnel, remonte de douze places et rentre peu avant 20 heure.
C'est Stuck qui retourne en piste.
L'allemand, décidément très en forme, signe un 4'10"18 qui restera le meilleur tour en GT de cette édition 1993.
Il profite des ennuis électriques d'Adams sur la Spice n°27 et gagne une place.
La Turbo S LM remonte au général, mais l'écart avec les XJ220 C reste globalement stable à un peu moins de cinq tours.
Une des anglaises ayant déjà abandonné sur surchauffe, tous les espoir restent permis.
Stuck profite du changement de plaquette sur la WR n°33 et remonte 20ème avant de passer le relais à Walter Röhrl à 21h05.
Le double Champion du Monde des Rallyes attaque comme un diable, trop peut être...
Peu avant 22 heure, Rörhl tente de passer la Debora de Gérard Tremblay au freinage de la première chicane, mais le pilote de la barquette est gêné par une Porsche GT et freine plus fort que ne l'avait estimé Röhrl.
L'allemand tente de virer à gauche mais percute l'arrière de la Debora.
Le choc parait presque anodin et les deux voitures repartent.
Mais alors que la Tremblay rejoint les stands au ralenti pour faire changer l'aileron de la Debora, il est vite évident que le radiateur d'huile de la Porsche, situé à l'avant droit et crevé.
Röhrl macule la piste d'huile et tente de rentrer au ralenti, semant le désordre sur son passage.
La S LM ne finira jamais son tour.
Vers 22h10, le moteur serre à l'entrée du virage...Porsche, et les commissaires la poussent derrière le rail.
L'abandon est officialisé à 23h20.

Porsche 964 Carrera RSR 3.8 #WP0ZZZ96ZPS496074 de Joël Gouhier, Dominique Dupuy et Jürgen Barth 24 Heures du Mans 1993
C'est finalement la Porsche 964 Carrera RSR 3.8 #WP0ZZZ96ZPS496074 de Joël Gouhier, Dominique Dupuy et Jürgen Barth qui va remporter le GT, sur le tapis vert.

C'est la Jaguar XJ220 C TWR de John Nielsen, David Brabham et David Coulthard qui s'impose en GT, arrivant à 69 tours de la Peugeot 905 victorieuse de Eric Hélary, Geoff Brabham et Chistophe Bouchut.
C'est la seule XJ220 C qui rejoint l'arrivée, les deux autres ayant abandonnés sur surchauffe.
Mais le lundi, lorsque les commissaires techniques vérifient la voiture, ils déclarent le système d'échappement non conforme et la disqualifient.
C'est finalement la Porsche 964 Carrera RSR 3.8 #WP0ZZZ96ZPS496074 de Joël Gouhier, Dominique Dupuy et Jürgen Barth qui va remporter le GT, sur le tapis vert.
La RSR 3,8l, engagée par le Monaco Media International, était en fait exploitée par l'écurie de Jack Leconte, le Larbre compétition, qui débute au Mans après avoir fait ses preuves en Carrera Cup et permet d'entrée à Porsche de remporter le GT lors de l'épreuve mancelle

L’épouvantail du Championnat BPR 1994.

Après l'édition 1993 des 24 Heures du Mans, considérés par tous comme une réussite aux vues du contexte, des pourparlers vont s’engager entre Jürgen Barth, patron du service compétition/client de Porsche, Stéphane Ratel, patron du service couse de Venturi, et Patrick Peter, qui organise des course de VEC tels les Coupes de l'Age D'Or.
Les trois hommes ont dans l'idée de combler le vide laisser fin 1992 et de créer un championnat d'Endurance réservé aux GT.
Les choses prennent forme peu à peu et un calendrier de huit courses, alternant des manches de 3 ou 4 Heures et des épreuves de 1000 km est publié, s'étalant du 6 mars au 13 novembre 1994.
En attendant, la Turbo S LM retourne à la piste.
Jürgen Barth ayant particulièrement apprécié l'organisation du Larbre Compétition durant les 24 Heures 1993, la 964 bi-turbo est confiée à l'écurie poitevine.
Selon certaines sources, la voiture aurait été alors remotorisée avec un Flat6 3,6l préfigurant les prochains moteurs de série des 964 Turbo S, mais pour avoir un ami qui travaillait chez Larbre à l'époque, je peux vous affirmer qu'elle avait bien conservé sont bloc de 962.
Avec le soutient discret de l'usine, la voiture est engagé au nom du Larbre Compétition au 24 Heures de Daytona 1994 début Février.
En piste, la voiture va être confiée à Bob Wollek, Dominique Dupuy, Jesus Pareja et forcément, Jürgen Barth.
En course, un à un, tout les nouveaux prototype de la classe WSC vont disparaitre, laissant la place à des Nissan 300 ZX Turbo Cunningham très en forme.
Mais la Turbo S LM, qualifiée 10ème en 1'84"898, va profiter des abandons et remonter vers le podium.
En fin de course, le moteur de la Nissan de pointe rend l'âme et même si l'autre nippo-américaine s'impose, la Turbo S LM termine sur la seconde marche du podium, à 24 tours.
Un mois plus tard, la première manche du Championnat BPR se déroule au Castellet devant un public pour le moins clairsemé, faisant craindre le pire aux organisateurs.
La Turbo S LM engagée par Larbre Compétition de nouveau est confiée à Bob Wollek, Jean-Pierre Jarier et Jésus Pajera.
Jarier est dans son jardin au Paul Ricard et signe la pôle en 2'01"640.
La course de quatre heures va faire penser à une vieille publicité pour la 911, "Vous ne la verrez jamais que comme ça".
La Turbo S LM va littéralement tourner autour de ses adversaires sur le Paul Ricard, la Porsche Bi-Turbo Freisinger de Dören et Irmgratz termine seconde à deux tours, Larbre affiche sa domination en plaçant sa RSR pilotée par Dominique Dupuy et Jack Leconte sur la troisième marche du podium à trois tours, remportant au passage le GT1 et le GT3.

Porsche 911 Turbo S LM Essais Préliminaires des 24 Heures du Mans 1994  Dominique Dupuy.
La 911 Turbo S LM lors des Essais Préliminaires des 24 Heures du Mans 1994 pilotée par Dominique Dupuy.

Le 10 avril ont lieux les 4 Heures de Jarama, seconde manche du championnat.
L'entrée est totalement gratuite et cette fois le public commence a être au rendez vous.
Pour l'occasion, Dominique Dupuy remplace Bob Wollek dans le trio de pilotes.
Cette fois c'est la F40 de Della Noce pilotée par Anders Olofsson qui réalise la pôle en 1'35"881 et semble pouvoir donner la réplique à la S LM seulement troisième à presque deux secondes pleines, la Venturi d'usine de Ferté et Neugarten s’étant intercalée en première ligne.
Mais en course, la F40 va connaitre un problème de turbo après un bon départ et la Venturi va casser son moteur.
Jarier, Pareja et Dupuy imposent de nouveau la S LM devant les Carrera RSR 3,8l de Bellm et Nuttall et de Calderari et Bryner à deux tour également.
Les Essais Préliminaires des 24 Heures du Mans 1994 se déroulent le 8 mai.
La Turbo S LM est confiée à Dominique Dupuy qui signe le septième temps en 4'16"800.
Mais une fois encore Porsche a bien pris soin de lire le règlement et y a détecté une nouvelle faille qui va lui permettre d'engager la version routière de la Porsche 962, présentée par Jochen Dauer au Salon de Francfort 1993, en GT1.
Dans ce cas de figure, l'usine n'a pas besoin d'un adversaire de plus et demande à Jack Leconte de "se contenter" d'engager ses deux Carrera 3,8l RSR.
Evidemment, le team manager français accepte, la 911 Turbo S LM ne participera pas une seconde fois aux 24 Heures du Mans.
Pour préparer aux mieux les Préliminaires, Larbre avait pourtant fait l'impasse sur la troisième manche BPR, les 4 Heures de Dijon, courues le 1er mai.
Cette fois, en l'absence de la Porsche de pointe et de la F40, les Venturi signent le doublé.
La Jacadi d'usine de Ferté et Neugarten s'impose devant l'Agusta de Coppelli et Olczyck, la RSR de Bellm et Nuttall prend la troisième marche du podium.
Engagée fortement en Carrera Cup, et préparant Le Mans en GT2, la petite structure du Vigeant va laisser le Championnat BPR de côté temporairement.
Le 29 mai, Henri Pescarolo et Jean-Claude Basso apportent une seconde victoire à Venturi lors des 1000 Km de Paris, mais cette fois sur celle du JCB racing.
Les 19 et 20 juin, Porsche va réaliser le plus beau hold-up de l'histoire mancelle et signer sa treizième victoire dans la Sarthe en permettant à la Dauer 962 de Baldi, Dalmas et l'inusable Haywood, de s'imposer, non seulement au général, mais en plus en GT1.
Le Larbre Compétition, de son côté, amène sa 3,8l RSR survivante, pilotée par Jesus Pareja, Dominique Dupuy et Carlos Palau, au 8ème rang, reportant brillamment le GT2.
Le 10 Juillet, la F40 de Luciano Della Noce et Anders Olofsson remporte les quatre Heures de Vallelunga, signant la seule victoire de la belle italienne en BPR.

Porsche 911 Turbo S LM 3 Heures de Zhuhai 1994, le Vigeant.
Au retour de sa tournée asiatique, la 911 Turbo S LM est préparée pour être vendue.


L'écurie Larbre Competition, concentrée sur la Carrera Cup, sera également absente lors des 4 Heures de Spa Francorchamps.
Après une course âpre, la Venturi d'usine de Ferté et Neugarten s'impose d'une petite douzaine de secondes à la Ferrari F40 de Della Noce et Olosfsson.
Durant le courant de l'été 1994, le Larbre Compétition va réussir à décrocher un budget auprès d'un célèbre cigarettier français qui ne peut plus, loi Evin oblige, faire de publicité sur le territoire national.
Accompagné, selon certaines sources, d'un soutient financier de Porsche qui tente de développer son image dans le sud-est asiatique,  la Turbo S LM et la Carrera RSR 3,8l, accidentée au Mans par Jean-Luc Chéreau, sont préparées pour les deux dernières courses du championnat BPR.
Le 28 Aout, la tournée asiatique de l'écurie viennoise commence lors des 1000 km de Suzuka.
Les essais ont été, forcément, dominés par la Toyota 94C-V LM du SARD Racing Team pilotée par Jeff Krosnoff et Mauro Martini qui signe la pole en 2'04"846, presque six secondes pleines devant la très performante Ferrari F40 du Strandell Motorsport.
La Turbo S LM, emmenée par Jean-Pierre Jarier, Bob Wollek et Jesus Pareja, se contente d'un modeste huitième temps en 2'13"674.
La Toyota 94C-V LM domine le début de course et compte jusqu'à quatre tours d'avance.
Mais au 97ème tour, Martini part à la faute dans la courbe Degner et tape du côté droit, les dégâts semblent limités, mais la Toyota, dont la transmission est manifestement touchée ainsi que la direction, ne repartira pas.
C'est alors l'étonnante Mazda RX-7 de Yojiro Terada, Franck Fréon et Korau Iida qui prend la tête de la course.
La Turbo S LM qui vient de ravitailler, est à un tour de la japonaise.
Deux tours plus tard, la Honda NSX du Nakajima Planning, pilotée par Kouji Satou, Yasutaka Hinoi et Tetsuya Tanaka, alors sixième, sort très violemment, presque au même endroit que la Toyota, et termine sur le flanc, au milieu de la piste.
La course est stoppée au drapeau rouge au centième tour.
A la reprise, la RX-7 connait des difficultés et reste aux stands.
La Turbo S LM prend le commandement et ne le quittera plus.
Les pilotes de la Mazda tentent de remonter, mais Terrada va sortir dans Spoon et la RX-7 terminera finalement très attardée.
Les pilotes de la Porsche Larbre Compétition vont "enrouler" jusqu'à l'arrivée et s'imposer devant la Honda NSX du Team Kunimitsu qui termine à 1'17", et remporte le GT3.
L'Oscar SK 5.2 du Oscar Racing complète le podium à 2'00" et remporte la classe RS.
De leur côté, Jürgen Barth et Jack Leconte amènent la 964 RSR 3,8l au neuvième rang à sept tours après un début de course difficile.

Porsche 911 Turbo S LM 3 Heures de Zhuhai 1994, le Vigeant, Larbre Compétition.
La Turbo S LM dans les locaux de Larbre Compétition au Vigeant à son retour de Chine.

Les deux autos du Larbre Compétition vont retrouver la piste mi-novembre pour les 3 Heures de Zhuhai.
Le BPR innove en organisant une des premières courses internationales en Chine sur ce circuit urbain tracé dans les rues de Jin Ding.
Pour l'occasion, Jacques Laffite remplace Jesus Pareja dans le trio de pilote de la Turbo S LM, Jean-Luc Chéreau retrouve Jack Leconte au volant de la RSR 3,8l.
Les hommes du Larbre Compétition vont connaitre un weekend parfait.
Qualifiée en pole, la Turbo S LM va littéralement survoler la course de trois heures.
Jarier, Wollek et Laffite s'imposent devant la 911 Bi-Turbo du Konrad Motorsport pilotée par Franz Konrad et Tiff Needel, qui terminent à trois tours, et la Carrera RSR 3,8l Heico de Ebeling, Richter et Wlazik, à quatre tours et qui remportent le GT3.
Jean-Luc Chéreau et Jack Leconte terminent cinquième à sept tours.

Fin de carrière et bilan.
Vue moteur Porsche 911 Turbo S LM 3 Heures de Zhuhai 1994, le Vigeant, Larbre Compétition.
Une vue du bloc 962 de la Turbo S LM prise chez Larbre, au Vigeant, peu avant la vente de la voiture.

Avec l'arrivée annoncée des McLaren F1 GTR pour la saison BPR 1995, le sort de la Turbo S LM est déjà scellé.
Peu après son retour de Chine, elle va être vendue à un collectionneur français qui va la conserver en l'état, dans la configuration de sa dernière course victorieuse, et semble encore la posséder aujourd'hui.
Étonnamment, l'histoire a presque oublié cette magnifique auto, ce modèle unique, crée à la toute fin de l'aventure 962 et qui préfigure déjà, par certains côtés, la série des futures Porsche GT1.
Est-ce le rendez-vous manqué de son unique participation aux 24 Heures du Mans ou la rareté de cette"935" des années 90 qui la fait méconnaitre du grand public?
Il faut espérer que le retour en grâce actuel des premières années du Championnat BPR lui rendra la place qu'elle mérite.
Effectivement, pour la première année de ce championnat naissant, les organisateurs avaient décidé que pour ces "courses de gentlemen", aucun points ne seraient attribués.
Dommage pour la Turbo S LM et le Larbre Compétition, car avec ses quatre victoires dans les quatre courses auxquelles elle a participé, sur huit manches au total, elle aurait évidement amené le titre à l'écurie du Vigeant.
Mais on ne réécrit pas l'histoire, et elle restera à jamais l'épouvantail d'un championnat sans couronne.

Il est à noter que certaines sources évoque une participation de cette auto sous les couleurs Obermaier en 1995, mais il doit y avoir méprise avec la Porsche Bi-Turbo du team allemand.

J'avais eu la chance de revoir le Turbo S LM une dernière, fois fin 1994, alors qu'elle était révisée et remise en état pour son nouveau propriétaire.
C'est cette série de photos, prise dans les locaux du Larbre Compétition au Vigeant que je partage avec vous.
La Turbo S LM a participé à quelques concentrations Porsche et semble avoir été vu lors d'une des éditions du Daytona Classic. Mais malheureusement ses apparitions restes extrêmement rares et discrète.
Je garde pourtant espoir de recroiser un jour cette magnifique auto.
 

Porsche 911 Turbo S LM 3 Heures de Zhuhai 1994, le Vigeant, Larbre Compétition.
Une vue sur les deux turbos KKK alimentant le bloc 962.

 

Porsche 911 Turbo S LM 3 Heures de Zhuhai 1994, le Vigeant, Larbre Compétition.
Philippe change les durites d'admission de l'énorme échangeur air/air habituellement placé au dessus du moteur.

 

Porsche 911 Turbo S LM 3 Heures de Zhuhai 1994, le Vigeant, Larbre Compétition.
L'énorme aileron bi-plan de la Turbo S LM pris ici devant la Carrera Cup de Jack Leconte.

 

Porsche 911 Turbo S LM 3 Heures de Zhuhai 1994, le Vigeant, Larbre Compétition.
La planche de bord minimaliste permet de voir qu'en 1994, la zone rouge était fixée à peine au dessus de 7000 tr/min, ce qui explique peut être, en partie, les 4'16"80 de Dominique Dupuy aux Préliminaires.

 

Porsche 911 Turbo S LM 3 Heures de Zhuhai 1994, le Vigeant, Larbre Compétition.
Comme sur la Carrera RSR 3,8l, le complexe arceau cage, soudé en de nombreux points à la coque, participait à la rigidité de la voiture sur la Turbo S LM.

 

Porsche 911 Turbo S LM 3 Heures de Zhuhai 1994, le Vigeant, Larbre Compétition.
Sur la Turbo S LM le Bosch Motronic 1.7 spécifiquement programmé pour l'auto est monté renversé par rapport à son implantation dans les 962, d'où cette impression bizarre que le logo de la marque au rivet est inscrit à l'envers.

 

Palmarès de la Porsche Turbo S LM
-7ème des 12 Heures de Sebring 1993 et victoire en INV GT avec Walter Röhrl, Hans-Joachim Stuck et Hurley Haywood.
- 11ème des Essais Préliminaires des 24 Heures du Mans 1993 avec Hans-Joachim Stuck et Lionel Robert.
- Abandon aux 24 Heures du Mans 1993 (casse moteur suite à un accrochage) avec Walter Röhrl, Hans-Joachim Stuck et Hurley Haywood.
- 2ème des 24 Heures de Daytona 1994 avec Bob Wollek, Dominique Dupuy, Jésus Pareja et Jürgen Barth.
- Victoire aux 4 Heures du Paul Ricard 1994 avec Bob Wollek, Jean-Pierre Jarier et Jésus Pareja.
- Victoire aux 4 Heures de Jarama 1994 avec Jésus Pareja, Jean-Pierre Jarier et Dominique Dupuy.
- 7ème des Essais Préliminaires des 24 Heures du Mans 1994 avec Dominique Dupuy.
- Victoire aux 1000 Km de Suzuka 1994 avec Jean-Pierre Jarier, Bob Wollek et Jésus Pareja.
- Victoire aux 3 Heures de Zhuhai 1994 avec Bob Wollek, Jean-Pierre Jarier et Jacques Laffite.


 

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L
c elle du mans 1993 et la version au couleur gitane sont 2 chassis different !
Répondre
L
la version couleur gitane a ete ou est propriete de Mr Picasso
J
Bonjour,<br /> <br /> Connait on le numéro de châssis de cette auto ?! Il semblerait que H. Pfeifhoffer ( Autriche ) soit propriétaire d'une 964 Turbo S Leichtbau Le Mans ( mais il s'agit je pense d'une ex-Brumos, donc pas LA 964 turbo S LM que l'usine engagea au Mans et sur base de Turbo S Leichtbau )... il m'a, par ailleurs, été rapporté que LA Turbo S LM se trouverait à Monaco dans une collection privée.<br /> <br /> Dans tous les cas : Très bel et passionnant article pour un modèle unique et hypnotique !
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J
Je ne manquerai pas de le faire si je parviens à obtenir des informations supplémentaires !
V
Bonjour, <br /> Nous avons, à priori, les même infos selon lesquelles elle serait dans une collection monégasque.<br /> Concernant l'autrichienne, il est possible que ce soit effectivement la Brumos de 1994 ou une des bi-turbo construites à l'époque par différents préparateurs (Freisinger, Konrad...).<br /> Du côté du n° de châssis, j'ai eu plusieurs versions, celle d'une coque non- frappée, prélevée sur la production, mais pour les gens qui l'ont fait rouler en 1994, il est probable qu'elle ait un numéro de série de Leichtbau, mais personne ne s'en souvient chez Larbre.<br /> Je n'ai pas réussi à obtenir sa fiche de pesage des 24 Heures du Mans 1993, où il devrait être indiqué s'il existe.<br /> Si vous avez plus de succès que moi, n'hésitez pas à m'en faire part.<br /> Bonne journée à vous et merci pour le commentaire. <br />
E
Bonjour,<br /> <br /> La Porsche Brumos 59 de Daytona 1994 est elle un modèle identique?
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V
Bonjour, <br /> Je vous dis ça de mémoire, mais il me semble que la Brumos des 24 Heures de Daytona 1994 étais une préparation américaine qui n'était pas basée sur une "Leichtbau" et elle était motorisée par un 3,6l bi-turbo en lieu et place du bloc de 962, mais je peu me tromper.
C
J’ai adoré cet article. La Porsche 911 turbo est un modèle pour lequel j’ai un faible. J’aime bien regarder cette auto sur le circuit, surtout quand c’est les 24 Heures du Mans !
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